La nouvelle médiation des litiges immobiliers

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Parfois, il arrive que certaines innovations règlementaires, aussi importantes soient-elles, passent totalement inaperçues.

Il en va ainsi d’une ordonnance majeure du 20 août 2015 relative au traitement extrajudiciaire des litiges de consommation, s’appliquant notamment aux agents immobiliers et aux administrateurs de biens. Un décret publié au Journal officiel du 31 octobre 2015 vient préciser les modalités de mise en place de la médiation des litiges de la consommation, les professionnels devant être conformes à l’ensemble de ces dispositions depuis le 1er janvier 2016.

Ces textes stipulent qu’au plus tard le 1er janvier 2016, chaque professionnel de la consommation se doit de proposer un service de médiation, indépendant et gratuit, à ses clients s’estimant lésés.

Les modalités sont vastes, allant d’un dispositif intrinsèque à l’entreprise à un médiateur sectoriel.

Les coordonnées du médiateur se doivent d’être affichées et visibles sur le lieu de vente, au même titre que les informations légales classiques.

En tout état de cause, cette avancée arrive à point nommé, puisque la Commission de contrôle (cette commission devra traiter et sanctionner « tout manquement aux lois et règlements ou toute négligence grave ») prévue par la loi ALUR du 24 mars 2014 devrait voir le jour prochainement.

Toutefois, en complément des textes légaux et réglementaires, a été édicté un code de déontologie au préalable, dans le but de servir de base aux jugements prononcés par la Commission.

Alors pourquoi cette nouvelle étape de la médiation extrajudiciaire ? Simplement pour traiter à l’amiable les litiges qui peuvent l’être et ainsi désengorger la Commission et les tribunaux ordinaires. Même si la saisine de la Commission sera gratuite, il s’agit là de gagner en efficacité et d’économiser des moyens, l’action de la Commission étant onéreuse pour les finances publiques. C’est pour cette même raison de coût, que son installation est retardée. Elle est attendue pour le début de l’année prochaine. Quant aux tribunaux, même si le recours à un avocat ne s’avère pas toujours nécessaire du moins pas pour toutes les causes, s’engager dans une procédure est souvent dispendieux.

Sans conteste, l’intronisation d’une plus grande discipline professionnelle prévue par la Commission de contrôle dans le cadre de la loi ALUR témoignait d’un progrès précieux pour rassurer l’opinion et réconcilier les administrateurs de biens et agents immobiliers avec leurs clients. Toutefois, le pari est risqué, puisque si les jugements rendus mettent en avant que le corps professionnel est souvent pris en défaut, la réputation de la profession pourrait en pâtir avant de se redresser. La médiation au contraire, rapprochera les ménages des professionnels immobiliers, à travers l’application de solutions sans heurts. Il est impérieux que les professionnels du secteur travaillent à sa mise en place.

Car si le secteur de l’immobilier n’échappe pas à l’obligation de mettre en place un service de médiation, il s’y met en ordre dispersé.

Cependant certains ont déjà désigné leur « médiateur de la consommation » et d’autres sont sur le point de le faire.

Ainsi, la FNAIM s’apprête à choisir son médiateur, qui sera accessible aux clients au plus tard le 30 juin prochain. En moyenne, la FNAIM, qui dispose de 11 000 affiliés, compte 4 600 réclamations par an dont 600 jugées « recevables », et qui seraient susceptibles d’accéder au stade de la médiation. Parmi les dossiers que le médiateur devrait avoir à traiter, figureront ceux relatifs au métier de la transaction, ainsi qu’à la gestion locative, tant que la responsabilité de l’agent est engagée. En revanche, la médiation ne pourra s’appliquer aux thématiques en lien avec les copropriétés, qui représentent environ 30% des réclamations. En effet, le syndicat de copropriété est une personne morale qui est cliente du syndic.

On devrait donc assister à de multiples nominations dans les mois qui viennent, car chaque groupe, voir chaque agence, a la liberté de proposer la réponse de son choix. Ainsi certains tels SOLVIMO et AVIS, dubitatifs sur le sujet, n’ont pas exclu la FFF (Fédération Française de la Franchise) quand d’autres comme ORPI et ses 1 250 agences ont opté pour Etienne Petit, le médiateur rattaché à la Fédération du commerce associé et coopératif (FCA).

Rappelons que chacune des parties a la possibilité de quitter le processus de médiation à quelque stade que ce soit, comme de rejeter la solution proposée par la médiation pour porter l’affaire en justice. La procédure sera aux frais du professionnel et totalement gratuite pour le client, hormis d’éventuels frais d’expertise. Ce montant, parfois élevé, incitera sûrement le professionnel à composer en direct pour les réclamations d’un faible montant. Cette nouvelle réglementation appliquée au domaine de l’immobilier apparaît donc comme une réelle avancée pour les consommateurs.

A l’inverse, il n’en va pas de même pour les administrateurs de biens et agents immobiliers, pour qui cette obligation nouvelle représente une charge. On le voit bien, la mise en place d’une telle structure en interne implique pour les professionnels de nombreuses conséquences, tant organisationnelles que financières. Les entreprises doivent donc se conformer à de nouvelles obligations légales, dont le respect suppose des modifications structurelles de leurs procédures internes de règlement des litiges ainsi que des investissements financiers et humains. Autant d’investissements et de changements difficiles à gérer dans une conjoncture économique difficile.

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